Québec Digitalisation Renouveau syndical Numérique et renouveau syndical aux TUAC Anouk Collet, Nil Ataogul et Marie-Eve Lachapelle Anouk Collet, Nil Ataogul et Marie-Eve Lachapelle Publié le 21/10/25 Sommaire De nouvelles méthodes de recrutement L’assemblée virtuelle L’entente avec Uber Les auteurs Anouk Collet est Conseillère principale au président national, Syndicat des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC Canada). Nil Ataogul est Coordinatrice à la syndicalisation, Québec, TUAC Canada. Marie-Eve Lachapelle est Conseillère aux communications et au recrutement, TUAC 500. Fermer Les auteurs Anouk Collet est Conseillère principale au président national, Syndicat des travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce (TUAC Canada). Nil Ataogul est Coordinatrice à la syndicalisation, Québec, TUAC Canada. Marie-Eve Lachapelle est Conseillère aux communications et au recrutement, TUAC 500. Le taux de syndicalisation au Québec est de 19% dans le secteur privé et de 90% dans le secteur public. Le paysage syndical au Québec regroupe principalement la FTQ[1] avec 600 000 membres, la CSN[2] avec 250 000 membres et la CSQ[3] avec 100 000 membres (principalement secteur de l’éducation).Le plus souvent, les centrales syndicales adoptent un pacte de non-maraudage lors du renouvellement des conventions collectives dans les entreprises[4]. Les TUAC[5] comptent 25 sections locales au Canada, avec 4 sections locales au Québec : les sections 225 P, 500, 501 et 1991P. Les TUAC au Québec sont affiliés à la FTQ. L’organisation compte plus de 250 000 membres au Canada et 1,3 million en Amérique du Nord. La section TUAC 500 est implantée au Québec dans le commerce de détail, le commerce d’alimentation, entrepôts associés, la transformation alimentaire, également l’hôtellerie, la culture, la transformation et la vente de cannabis qui a été légalisée par le gouvernement du Québec. Le staff syndical de la section 500 regroupe 50 à 60 personnes, celui de la section 501, 40 personnes soit au total 120 personnes avec une équipe de 8 personnes en charge de la stratégie syndicale. Le renouvellement de l’action syndicale via les outils numériques est une thématique essentielle pour les TUAC : comment les syndicats peuvent-ils se projeter dans l’avenir ? Présent dans les entrepôts automatisés, le syndicat s’intéresse au commerce en ligne et soutient les travailleurs des plateformes. L’intervention est également l’occasion de présenter l’entente nationale conclue entre Uber Canada et les TUAC Canada au bénéfice de 100 000 chauffeurs et livreurs qui utilisent la plateforme Uber. [1] Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec [2] Confédération des syndicats nationaux [3] Centrale des syndicats du Québec [4] Normalement, une période de maraudage intersyndical précède la (re) négociation des conventions collectives. Les syndicats font alors campagne afin de garder leurs membres ou en recruter. Souvent, ce maraudage laisse des traces, de l’amertume chez les syndiqués dans les établissements. Par un pacte de non-maraudage, les signataires s’engagent à ne pas chercher à recruter des membres auprès d’une autre organisation signataire. [5] Travailleurs et Travailleuses unis de l'alimentation et du commerce De nouvelles méthodes de recrutement Même si dans le contexte canadien la loi est plutôt favorable au Québec, le recrutement des syndicats est une « bataille en continu » (sachant que le syndicat n’a pas le droit de solliciter des travailleurs pendant le temps de travail). Pour syndiquer un travailleur, il est nécessaire de le rencontrer, de lui faire signer sa carte de syndiqué, de collecter sa première cotisation qui représente une somme symbolique de 2 $ exigée par la loi. Traditionnellement, le syndicat fait du porte-à-porte (par exemple avec 15 personnes le week-end), rencontrent les salariés dans un café, ou sur les lieux de travail avec des porte-paroles. C’est seulement, lorsqu’un syndicat obtient 50 % de syndiqués + 1 à l’intérieur d’une même firme qu’il est accrédité. En outre, bien que les TUAC aient syndiqué plus d’un million de membres, le turn over des syndiqués est important dans le secteur privé. Constatant qu’il devient difficile de recruter par des moyens conventionnels, nous avons mis en place de nouvelles méthodes via le numérique : envoi de textos à des groupes pour créer des relations, dématérialisation de la carte d’adhésion, paiement par carte bancaire et signature électronique (le paiement au comptant était parfois problématique), rencontres virtuelles (par exemple, une réunion à distance de 11h à 13h, a permis de syndiquer 40 personnes). La carte syndicale électronique est déjà en place aux TUAC depuis 5 ans avec le respect de la confidentialité et une accessibilité plus rapide. Une firme a développé une application assez simple. Lors du démarchage et dans la plus grande discrétion, les coordonnées de la personne intéressée sont renseignées et une carte syndicale générée automatiquement est envoyée par mail au nouveau syndiqué. Nous avons aussi recours au numérique pour la suite du processus : requête électronique au tribunal du travail, accréditation, négociation de la convention collective « par zoom ». La pandémie est venue renforcée notre détermination pour ce nouveau processus de syndicalisation. Les processus d’enquête sur la légitimité du syndicat prennent moins de temps et la syndicalisation est plus rapide. L’assemblée virtuelle Dans le commerce de détail, la porte d’entrée c’est le marché du travail, sachant que le secteur connaît un turn-over assez substantiel qui s’est accentué avec le COVID. On n’est pas dans l’âge d’or syndical, surtout aujourd’hui dans le contexte de difficultés de recrutement. Cela faisait des années que l’on disait aux syndiqués « venez à l’assemblée » mais il n’y avait pas foule. Nous avons présenté en 2019 un « plan de marche » qui n’a pas vraiment suscité l’intérêt. Avec le COVID, soit on restait dans nos « baskets confortables », soit on prenait le « chemin du renouveau ». Nous utilisons aujourd’hui une plateforme de vote et on trie les réponses avec le comité de négociation. Les assemblées à distance se font sur une semaine. On est passé d’une participation de 40% en général à 80 voire 90% de participation (auparavant, ne venaient que les plus âgés et tous les salariés n’avaient pas accès à l’entente). En définitive, il faut combiner le traditionnel et le numérique, continuer les rencontres en magasins, dans les services, par téléphone et y adjoindre le numérique pour élargir notre audience. L’enjeu est aussi de s’adapter aux membres, avec le constat que les syndiqués sont de plus en plus jeunes. 41.5% des TUAC 500 ont moins de 24 ans et 60 % d’entre eux sont utilisateurs de TikTok et ont entre 16 et 24 ans. Nous avons été la première organisation syndicale francophone au Québec dans le secteur privé à utiliser cette plateforme. Pour rester pertinent, il est souhaitable de mettre en place de nouveaux outils pour parler aux nouvelles générations et impliquer de nouveaux délégués dans le syndicalisme. L’entente avec Uber Dès 2018, le syndicat a approché des chauffeurs/livreurs Uber au Canada pour leur parler syndicalisation, plus particulièrement en Ontario et en Colombie Britannique. Les chauffeurs/livreurs Uber représentaient plusieurs milliers de travailleurs avec un turn over important. Pour accréditer le syndicat, une première difficulté résidait dans le fait qu’il était nécessaire d’obtenir l’adhésion syndicale de la majorité absolue des salariés au sein d’une « unité de négociation ». Une seconde difficulté était également de définir cette unité. Au Royaume-Uni, une entente avait déjà été possible en mai 2021. Néanmoins, les TUAC Canada sont allés plus loin. Débutées à l’automne 21, les négociations ont abouti à une entente en janvier 2022. Cette entente de nature privée est plus régie par le code civil que par le code du travail. Elle comporte deux volets : La représentation des chauffeurs Un service gratuit a été mise en place pour tous les chauffeurs canadiens sur la base du volontariat. Par exemple, lorsque des chauffeurs et des livreurs sont confrontés à un problème avec leur compte ou lors de sa désactivation, ils peuvent faire appel aux TUAC. Le syndicat se tourne vers UBER en première intention. Si le différend persiste et que la plateforme refuse de réactiver le chauffeur, il est fait appel à un processus d’arbitrage, un tribunal privé rendant alors une sentence en fonction du dossier soumis. Les TUAC ont négocié un accès aux travailleurs dans les centres UBER pour que les représentants syndicaux puissent offrir leurs services. Ils ont reçu plus de 7000 demandes, avec 392 dossiers de désactivation. UBER a revu près de 228 dossiers, avec d’abord 78 chauffeurs réactivés, près d’une centaine à ce jour. De meilleures conditions de travail La plateforme tenait à la flexibilité, donc la question du statut a été mise de côté. L’entente s’est faite sur d’autres points : d’abord, une garantie de revenus, en sachant que les normes législatives sont établies au niveau des provinces du Canada ; ensuite, un fonds d’avantages sociaux qui suit les travailleurs qui circulent d’une plateforme à une autre, dès lors qu’ils effectuent au moins 20 h de travail par semaine sur un trimestre. La fin de contrat donne droit à un préavis ou une indemnité. Une protection en matière de santé et de sécurité s’active au bénéfice des chauffeurs en cas d’accident et couvre les dommages subis. Sur ce dernier point, c’est UBER qui s’est engagé à faire du lobbying, aux côtés du syndicat, auprès du gouvernement pour que ses travailleurs indépendants aient accès, au même titre que les salariés, à cette couverture. Et, bien sûr, ce deuxième volet reconnaît le droit à une représentation syndicale avec accès à la négociation collective. Pour en savoir plus : télécharger la présentation "Numérique et renouveau syndical aux TUAC" PDF - 1 774.3 Ko Article précédent Article suivant Article précédent Sentinelle, un outil de gestion syndicale Article suivant Numérique et renouveau syndical aux TUAC (interview) Ceci pourrait vous intéresser L’état des lieux de l’usage de l’IA en GRH au Québec L’usage de l’intelligence artificielle en RH au Québec croît rapidement, et la démocratisation de nouveaux outils comme ChatGPT pourrait réduire les écarts entre petites et grandes entreprises. Québec Le ciblage des interventions sur les risques humains et l’automatisation des tâches simples ... Secteur bancaire Comment se caractérise la transformation du travail dans le contexte de l’industrie 4.0 ? ... Québec Tout découvrir